La saga du déclassement du quartier des Corbillettes à Vernier

Le projet de déclassement en zone 3 de développement (ZD3) des Corbillettes a été dressé par le département le 1er mars 2001, Le Conseil municipal de Vernier l’a cependant préavisé défavorablement le projet modifié (29 contre, 1 abstention) en date du 18 décembre 2001. D’un commun accord entre le Conseiller d’Etat chargé de l’aménagement du territoire et la commune de Vernier, le projet avait alors été mis en suspens. En août 2010, le Conseil d’Etat a informé le Conseil administratif de Vernier de sa volonté de reprendre le processus de déclassement mais sur un périmètre légèrement réduit afin de se limiter au territoire de la commune de Vernier. Lors de cette séance, il a été convenu que les propriétaires et la commune seraient étroitement associés à l’élaboration des plans localisés de quartier.

Le projet de loi modifié a été déposé le 23 juin 2011 devant le Grand Conseil. Les travaux de la commission de l’aménagement sur le déclassement ont débuté le 28 septembre 2011 et se sont arrêtés le 2 novembre 2011 après l’audition de la commune de Vernier, de l’association des Corbillettes (AICC), de Pic-Vert, de la CGI et de l’APCG. Les auditions ont mis en avant l’opposition des associations d’habitants et de la commune de Vernier. Cette dernière soulignait par ailleurs que le projet de déclassement ne respectait pas son plan directeur communal qui lui, ne prévoyait que la densification du front de rue de l’Avenue Louis-Casaï.

A l’initiative de la nouvelle présidente de la commission depuis novembre 2011 (Christina Meissner, UDC), un processus participatif s’est mis alors en place impliquant la commune de Vernier, les habitants et l’Etat. Bien parti, il avait toutes les chances d’aboutir, pour autant que le déclassement ne soit pas voté entretemps ce qui aurait dressé toutes les parties prenantes sur les pattes arrières.

Les présidences de commission ne durant qu’une année, c’est le Vert François Lefort, qui l’a repris en novembre 2012. Prérogative du président, il a remis illico presto le PL 10843 à l’ordre du jour de la commission. Le 5 décembre 2012, il est voté dans l’heure. Seuls l’UDC et le MCG l’ont refusé. La majorité des partis ont rejoint la position du Conseiller d’Etat, insistant sur le fait qu’il était essentiel de procéder rapidement au déclassement, que la participation devait se faire dans le cadre de la ZD3 et qu’il fallait éviter que des recours retardent l’entrée en vigueur du projet de loi . Il a fallu cependant près d’un an et demi pour que le projet de loi parvienne à être traité en plénière du parlement. Et là, coup de théâtre.

Le 16 mai 2014, le projet de déclassement en ZD3 n’a pas été voté par le parlement. Comme le demandait l’UDC (PL10348-A), il a été renvoyé en commission grâce aux voix du PLR, mais pas pour les mêmes raisons. L’UDC qui, depuis le début du traitement de cette modification de zone, est le seul parti à soutenir la position de la commune, demandait donc le déclassement en ZD3 uniquement du front de rue Louis Casaï, laissant ainsi le temps au reste du périmètre de se déterminer sur son futur à travers un processus participatif. Le PLR quant à lui, souhaitait que l’ensemble du périmètre soit déclassé en zone ordinaire 3 (Z3)

Le PLR a donc déposé en commission un amendement allant dans ce sens. De son côté, l’UDC a déposé l’amendement respectant la volonté communale. Le PDC, la Gauche, y compris les Verts, avec l’appui surprenant du MCG, ont, au contraire, confirmé leur volonté de déclasser l’entier du périmètre en ZD3. La force du nombre l’emportant, c’est bel et bien le déclassement en ZD3 de l’entier du périmètre, qui a été voté en commission et renvoyé le projet de loi (PL10843B) au Grand Conseil. Vu les amendements déposés, ni le PLR, ni l’UDC n’allaient l’accepter, restait à persuader le MCG pour obtenir une majorité.

Lorsque j’ai demandé l’urgence pour le traitement de ce projet de loi au Grand Conseil, je savais acquis l’appui du MCG pour un déclassement en zone ordinaire Z3. Sauf que le Conseiller d’Etat aussi ! Raison pour laquelle il a d’abord tenté de gagner du temps en demandant le report de la discussion au mois de février. A une voix près ( !) ce report a été refusé. Dès lors, le débat a eu lieu le 23 janvier 2015 comme demandé par le biais de la demande d’urgence. L’amendement déposé le jour-même par le PLR, le MCG et l’UDC modifiant le déclassement de ZD3 à Z3 a été accepté par la majorité composée des mêmes partis. Sauf que passer de ZD3 à Z3 est un tel changement qu’une nouvelle enquête publique doit être lancée avant que le Grand Conseil ne puisse adopter la loi. Raison pour laquelle le Conseiller d’Etat s’est vu obligé d’interrompre le vote (en refusant le troisième débat).

Il lui appartient maintenant de procéder à la modification du projet de loi et à le soumettre à l’enquête publique, avant de le déposer devant le Grand Conseil. Si les majorités ne changent pas, le déclassement en Z3 sera alors définitivement adopté.

Que va faire le Conseiller d’Etat? Suivre la volonté du Grand Conseil et risquer de fait l’opposition de la commune ? Cette dernière est tout autant opposée au déclassement de l’entier du périmètre en ZD3 qu’en Z3, lui préférant un déclassement partiel en ZD3 le long de l’avenue Louis Casaï uniquement. Plutôt que de risquer l’opposition gageons que le Conseil d’Etat préfèrera mettre son énergie sur d’autres périmètres, plus faciles à développer, et que le projet de déclassement des Corbillettes partira aux oubliettes.

L’ensemble du traitement du dossier au Grand Conseil se trouve sur mon site, sous Testes déposés au Grand Conseil Rapports  PL10843

Différences entre ZD3 et Z3

Pour rappel, la zone de développement (ZD3) a été instaurée pour pouvoir construire du logement dit « social ». Les prix sont contrôlés et la part de loyers libres ou de propriétés par étages (PPE) limitée. L’Etat et la commune peuvent exercer leur droit de préemption.

En zone ordinaire (Z3), nulle obligation de réaliser du logement social. Ainsi, en cas de vente, c’est le prix du marché qui s’applique et non celui contrôlé par l’Etat. Exit aussi le droit de préemption de ce dernier. Les propriétaires ne sont pas lésés, les promoteurs non plus. Mais la cohérence territoriale risque d’être malmenée par l’absence d’obligation de réaliser un plan localisé de quartier.

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