La prison et le parking de la Brenaz 2: Construire d’abord, régulariser ensuite ?

Le site pénitentiaire qui borde la Seymaz s’étale sur plus de 500 mètres. Il y a Champ-Dollon, l’ancêtre construit dans les années 70, voué au départ à enfermer les gens en attente de leur procès. En 2008, s’est ajoutée La Brenaz, puis, en 2014, Curabilis, pour les prévenus nécessitant un suivi psychiatrique. Enfin, en octobre 2015, la Brenaz +100 (Brenaz 2), qui forme avec la première du même nom un ensemble autonome. Par la suite, l’Etat veut créer un cinquième établissement: les Dardelles. Si les premières prisons étaient encore camouflées derrière un rideau d’arbres, la dernière en date a nécessité de raser une forêt et d’empiéter sur la zone agricole. Si la Brenaz 2 est moins gourmande en terres agricoles que Curabilis, sa construction s’est accompagnée d’un énorme parking de 325 places s’étendant sur 2,3 hectares.

Construire d’abord, régulariser ensuite

Le projet de loi du Conseil d’Etat sur lequel le parlement est appelé à se prononcer (PL 11695) demande au Grand Conseil de déclasser des terrains sur lesquels les bâtiments sont déjà construits et de la zone agricole pour partie déjà transformée en parking. Légalement, le déclassement aurait du avoir lieu avant le début des travaux et non après. Dans ce cas précis, le Conseil d’Etat a jugé inutile d’attendre le déclassement de ces terrains et a autorisé la construction d’une prison et d’un parking au beau milieu d’une zone agricole et d’une zone de bois et forêts, deux zones légalement inconstructibles. Ainsi, le Conseil d’Etat a outrepassé le cadre légal imposé par la loi d’application de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LaLAT) qui garantit aux citoyens de faire valoir leurs droits. Par ailleurs, en outrepassant le cadre légal, le Conseil d’Etat s’est octroyé des compétences attribuées au Grand Conseil, pouvoir Législatif de notre canton, et seule autorité habilitée à rendre une zone constructible par l’adoption d’une loi de déclassement.

Pour justifier cette chronologie «  inversée », le Conseil d’Etat a évoqué l’urgence et le fait que le Grand Conseil était « au courant » car il avait voté le crédit d’étude en novembre 2013. Sauf que ce crédit ne prévoyait pas la construction d’un parking. Il est aujourd’hui pérennisé en parfaite illégalité.

L’urgence invoquée n’explique pas non plus les deux ans qu’il a fallu à l’Etat pour se rappeler, comme le mentionnait d’ailleurs le crédit d’étude, que les terrains à acquérir pour la réalisation de la prison, devraient faire l’objet d’un déclassement en zone de construction, l’oubli du parking et le prix payé pour le terrain agricole (8 x le prix maximal usuel !).

Dans ce dossier, le Conseil d’Etat n’a pas respecté la loi et les procédures, un citoyen lambda agissant de la sorte aurait été sévèrement sanctionné.

Quel que soit le vote du parlement, consulté après coup, rien de changera sur le terrain. Il n’y aura pas de conséquence pour la prison.  Il n’y a donc aucune raison d’accepter ce projet de loi.  Au contraire, en l’acceptant, à posteriori, le Grand Conseil avaliserait cette manière de faire, pour le moins irrespectueuse de la part d’un Exécutif et endosserait à son tour la responsabilité du non-respect de la loi. Un comble pour un pouvoir Législatif.

Si nous voulons continuer à vivre dans un Etat de droit, le Conseil d’Etat se doit de montrer l’exemple et respecter les lois, les procédures et les prérogatives du parlement.

En refusant ce projet de loi, le Grand Conseil a veillé à ce que ce genre d’agissement ne se reproduise pas.

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